Ce site a pour but de faire la promotion et rappeler aux générations, les évènements liés à la Seconde Guerre Mondiale dans le Nord de la France. Il nous semble important de travailler sur le devoir de mémoire afin de ne pas oublier.
lundi 10 mars 2014
Karin Kohl marche sur les traces de son père, ancien chef de la Gestapo (Paru dans la Voix du Nord du dimanche 9 mars).
Briques jaunes et vitraux à chaque palier de la cage d’escalier, le
bâtiment situé au 18-20 rue François-Debadts de La Madeleine est resté
dans son jus. Aujourd’hui, c’est un paisible immeuble d’appartements.
Durant la Seconde Guerre mondiale, les cris de torture y résonnaient de
la cave au grenier. La Gestapo, police politique nazie, avait son siège
régional exactement à cet endroit. Kurt Kohl, était un chef de groupe de
cette police secrète. Il a été tué le 29 décembre 1943 à Wazemmes Plus
de 70 ans plus tard, sa fille, Karin Kohl et son petit-fils,
Jean-Pierre, résidents aux États-Unis, marchent sur ses traces sous
l’œil d’une caméra.
Grégory Célerse, auteur de deux livres sur la Gestapo
lilloise, leur sert de guide. C’est lui qui a eu l’idée de ce
documentaire, qui sera diffusé cet été sur France 3. «
La visite commence ici, où a travaillé son père
puis nous allons nous rendre sur la place du marché de Wazemmes où il a
été abattu. Elle va rencontrer le petit-fils du résistant qui a tué son
père. C’est incroyable de les faire se rencontrer.
»
Affronter le passé paternel
«
Ok, alors tu vas parler doucement pour laisser la
place à l’émotion. Comme s’il y avait un recueillement. Il y aura un
commentaire par-dessus. Si tu parles tout le temps, ça va perdre de son
sens.
» Jean-Marc Descamps, réalisateur indépendant,
briefe Grégory Célerse. L’émotion est clairement ce qu’il recherche.
Karin Kohl, n’a jamais connu son père. Elle avait deux ans quand il est
mort. Personne ne lui avait vraiment raconté son histoire, qu’elle ne
tenait d’ailleurs pas à entendre… jusqu’à aujourd’hui. À 70 ans, elle
tape « Kurt Kohl » sur Internet. Elle tombe sur une bouteille à la mer
virtuelle lancée par Grégory Célerse, qui, en plein travail sur cet
homme, la recherche. Elle y répond. Ils échangent par mail puis elle
décide d’affronter le passé de son père, sept décennies plus tard. «
Grégory connaissait toute l’histoire. Celle que
personne ne m’avait encore racontée. Ma mère était contre le régime et
l’homme avec qui elle s’est remariée aussi. J’ai fini par vouloir en
savoir plus
», raconte-elle en anglais.
« C’est très émouvant »
Grégory Célerse sonne au hasard à l’interphone du
18-20 rue François-Debadts. La voix d’un résident grésille. Il accepte
d’ouvrir la porte. Karin entre à pas feutrés, dans un silence parlant. «
Je ne peux pas croire que je suis ici, 70 ans
plus tard. C’est à la fois étrange et au-dessus de toutes croyances.
Être confrontée au véritable endroit, c’est très émouvant.
» La cage d’escalier semble ne pas avoir été
changée d’un iota. Un résident descend. Les marches grincent. On
penserait presque entendre un membre de la Gestapo en train de dévaler
les marches. Grégory Célerse raconte des anecdotes sur le père de Karin.
Bien sûr c’était un membre de la Gestapo, mais Kurt Kohl n’en était pas
moins quelqu’un de très intelligent, et toujours habillé en costume. «
C’est très difficile à accepter que mon père ait pu faire partie de l’horreur de la guerre
», souffle-t-elle. Ce n’est pas vraiment de la honte qu’elle ressent. «
Ce n’est pas le bon terme. Je ne faisais pas
partie de cette histoire. Mais je me sens concernée. En tant
qu’Allemande, ça fait partie de mon passé. Je ne comprends pas cette
période. Comment cela a pu arriver ?
» Cette question, des millions d’Allemands se la
posent encore. Mais Karin Kohl, elle, sans avoir pour autant la
conscience tranquille, s’en posera beaucoup moins sur son père.
Connaître son passé aide à mieux l’appréhender.
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